Eaux du Wouri en danger : le S.O.S des pêcheurs aux autorités

Face à la contamination sans cesse du fleuve, ils appellent les pouvoirs publics à l’aide pour juguler la pollution qui tue les poissons et entraîne l’augmentation du prix des fruits de mer sur les étals.

Berge du Wouri: les pêcheurs reviennent sur la rive avec une moisson peu abondante

Il est un peu plus de 14 heures ce mercredi 13 octobre 2021 au débarcadère de Bonassama. Nous sommes dans le quatrième arrondissement de la ville de Douala. Deux buy and sellam, le regard perdu, essaient de marchander le prix du poisson. Le piroguier, la mine serrée, vient d’accoster. A l’intérieur de sa pirogue, une pêche pas très  abondante. Le prix du mélange de carpe, de mâchoiron et de sole vidé dans une bassine de 30 litres à moitié pleine qu’il fixe,  n’arrange pas les deux femmes. La première jette l’éponge. « C’est le poisson de 25.000fcfa que tu laisses à 40.000Fcfa ? Le mâchoiron en plus», regrette cette dernière avant de partir. La deuxième, plus téméraire, réussit à convaincre le pêcheur à « faire le prix » et repart avec la bassine.

 A deux pas de là, la négociation est rude entre Paul et le deuxième pêcheur. Il va jusqu’à raconter l’histoire de sa femme malade pour avoir la compassion du pêcheur. « Je te comprends mais le poisson est rare », rétorque le pêcheur qui finit par être sensible aux pleurs de Paul. « Je t’enlève 1000 Fcfa. Donne 14.000 Fcfa» ajoute-t-il. Un prix que Paul estime toujours cher pour 15 mâchoirons moyens. Il lui  propose 13.000Fcfa mais cela n’arrange pas  le pêcheur qui refuse de faire sortir le poisson de la pirogue.

A l’origine…. la pollution du Wouri

Des scènes comme celles-ci se multiplient au Quai de Bonassama. En fait, le prix du poisson pêché dans les eaux du Wouri ne cesse de connaître une flambée fulgurante causée par la pollution de l’eau du fleuve.

«Les poissons se reproduisent dans ces mangroves. Si on les détruit, on aura toujours un manque de poissons. Le problème de pollution du Wouri résulte aussi du fait que les sociétés déversent leurs déchets toxiques dans le fleuve. Le poisson devient rare et cher. Nous voulons attirer l’attention du gouvernement de nous venir en aide pour la préservation du fleuve »,

déplore Bruno Ekepa Solle, le président du Gic Quai de Bonassama.

En plus du prix, la qualité même du poisson ramené inquiète les revendeuses. «Quand les pêcheurs partent à l’eau, ils n’arrivent plus à pêcher. Ils ramènent très peu de poissons qu’ils revendent cher. Certains rapportent des poissons pourris. Ça nous met mal à l’aise », regrette Olga Alice Songa Penda, revendeuse de poissons depuis 26 ans au Quai de Bonassama.

L’appel à l’aide

Réunis au sein d’un Groupement d’Initiative Commune (Gic) les membres du Gic Quai de Bonassama, crient leur désarroi. Ce 13 octobre 2021, ils sont une trentaine à avoir stoppé leurs activités. Pancartes en main, ils se sont massés le long de leur espace de travail au bord du fleuve et expriment leur mécontentement. On peut y lire des slogans tels « Non à la pollution du fleuve Wouri », « Non à l’utilisation des produits toxiques », « oui à la protection de la mangrove »,   « Pour un Wouri sain, un poisson sain.» Afin de réduire la rareté et la mauvaise qualité des poissons pêchés le long du Wouri comme le fait remarquer Oscar Dibongo Mpome, pêcheur depuis 50 ans dans ce fleuve « Les sociétés et tous les drains de la ville de Douala se déversent dans le Wouri avec un excès de plastiques. On ne parvient plus à pêcher. Lorsqu’on met un appât sur l’hameçon, le plastique les recouvre et la pêche n’est pas fructueuse.»

Pour faire entendre leur voix, Le Gic Quai de Bonassama appelle les pouvoirs publics à les soutenir dans la  lutte contre la destruction du fleuve Wouri et le déversement des produits toxiques dans l’eau. « Nous luttons pour l’environnement et la destruction des produits sortis du Wouri. Notre GIC est là pour lutter contre la destruction du fleuve, les déchets toxiques et la destruction des mangroves. Si on détruit ses mangroves qui sont là où les poissons se reproduisent, il n’y aura plus les poissons » indique Bruno Ekepa Solle avant de poursuivre. « Nous voulons attirer l’attention du gouvernement pour qu’il nous vienne en aide’ Ceci dans le but de préserver non seulement la mangrove, leurs activités de pêche, mais aussi  la santé des consommateurs des produits du fleuve.

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