Insalubrité, agressions et vols sont monnaie courante ici. Et si l’envie vous vient de quitter du statut de locataire à celui de propriétaire d’une maison dans le Camp, préparez-vous… d’autres surprises vous attendent.
Madeleine est femme au foyer et mère de 5 enfants. Elle occupe un appartement de 3 chambres dans le « bâtiment H » du Camp Sic de Kotto à Douala au Cameroun. Au quotidien, sa progéniture et elle bravent les marches de l’escalier non éclairé qui arpente le bâtiment et donne sur son appartement. C’est le noir total. Attention, il faut poser le pied avec précaution. La couche de peinture n’existe plus sur les murs par endroit. Après plusieurs marches, nous sommes dans le domicile de Madeleine. Une porte en fer a été rajoutée à la porte en bois. «Ça va faire bientôt six ans que nous avons intégré cet appartement. Nous avons d’énormes problèmes de sécurité, faute de gardiens. Les gens volent dans l’immeuble et dans les parkings», indique-t-elle. Tout comme le bâtiment, le sanitaire, les installations électriques et la charpente sont vétustes. Tout est insalubre « les voisins déversent les eaux usées au rez-de-chaussée. Les fosses septiques sont également pleines».
Autre lieu, scénario identique ou pire, le Camp Sic de Makèpè. Au milieu de la multitude de logements sociaux que compte le Cameroun, bien que, pas assez pour les plus de 20 millions de Camerounais, vit la jeune Rachelle. Elle a intégré le 3ème niveau de l’immeuble « R impair » du Camp Sic Makèpè il y’ a plus de 15 ans. Aujourd’hui, elle n’en revient pas de ce qu’est devenue la belle bâtisse. Les murs sont délabrés et fissurés. « Je ne peux vraiment pas te dire à quelle date on a intégré le camp, mais j’étais encore petite. A l’époque, c’était encore bien éclairé et nettoyé par les services de la Sic (Société immobilière du Cameroun), le voisinage était cool ».
On agresse dans l’escalier
«Plus les années passent, Il y’a un manque d’entretien », déplore Rachelle. Les canalisations sont bouchées, les murs délabrés, les câbles électriques pendent sur les têtes, les alentours des bâtisses sont insalubres. Les tuyaux d’eau intégrés dans les charpentes lors de la construction sont cassés et causent des fissures les long des murs. « Avant les voisins se réunissaient en comité pour faire l’entretien et l’éclairage. Maintenant, plus rien n’est fait. Au contraire, certains locataires vident leur poubelle dans les caniveaux », décrie Rachelle.
Côté insécurité, l’heure est grave. L’absence d’éclairage ne facilite pas les choses « On est en insécurité grave. On agresse dans l’escalier du rez-de-chaussée et du premier niveau. A partir de 21heures, les gens se font passés pour des voisins, vous accostent dans l’escalier et vous agressent avec le couteau. Dès qu’ils ont pris ce que vous avez, ils repartent », raconte Rachelle, le visage terrifié. Pour les vols dans les bâtiments, ils passent par le balcon. D’ailleurs, chaque habitant, les gens du premier et du deuxième étage surtout, ont mis des grilles en fer sur les fenêtres. Les habitants du rez-de-chaussée ont été aussi contraints à mettre une porte en fer en plus de la porte normale.
La misère des propriétaires
Tenter d’acquérir un logement social pour en devenir le propriétaire n’est non plus chose facile. Henry P. en sait quelque chose. Il a eu sa notification d’attribution d’un logement au Camp Sic de Mbanga Bakoko du ministre de l’Habitat et du Développement Urbain, Jean Claude Mbwentchou, le 26 aout 2016. Les clés de son appartement devaient lui être remises à la fin de l’année 2016. Rendu à ce mois d’avril 2017, il est toujours en location, pourtant il s’est endetté pour payer cash et à près de 20 millions F. Cfa un appartement de 3 chambres. Depuis lors, il paie un loyer en remboursant le crédit. Une situation qui le traumatise « Je suis moralement et financièrement mal. Je me retrouve en train de payer un crédit et le loyer alors que je me suis endetté pour sortir de la location. Mon bailleur menace de m’expulser puisque je ne peux pas toujours payer le loyer», explique-t-il, ému. Il n’est pas le seul dans cette situation. Les 30% des propriétaires de logements ayant déjà versé l’argent cash pour certains et par le crédit foncier pour d’autres scrutent le ciel dans l’espoir de voir un jour la fumée blanche. Pourtant, à Mbanga Bakoko, les constructions de la plupart des Camps sont achevées et abandonnées.
Quand j’arrive sur le site de construction des logements sociaux de Mbanga Bakoko ce mercredi 19 avril 2017, il est 12h 30 minutes, je peux apercevoir les bâtisses déjà érigées. Les murs ont une couleur jaune/saumon pour les uns et marron/jaune pour d’autres. Certains Camps sont déjà finis et affichent fière allure, quand d’autres pourrissent dans la broussaille. Les ¾ des bâtiments sont déjà finis et fermés avec des cadenas. Sur le site, quelques ouvriers s’activent, sans casques de protection ni tenues. Ils sont vêtus pour la plupart de jeans sans t-shirts. Ils essaient autant que leur force leur permet de transporter du sable et autres outils de travail.
A quand les livraisons de chantiers ?
Aucune information ne filtre. Même pas à la Société immobilière du Cameroun (SIC), porteuse du projet. A la direction générale de ladite entreprise située au quartier Bonapriso à Douala, aucun délai n’est donné sur la date de livraison du chantier. Aucun renseignement précis. Les dossiers continuent d’être enregistrés. Seulement 30% des réservations sur les 1200 logements sont déjà faits, confie le monsieur assis dans un espace au rez-de-chaussée de l’immeuble délabré de la SIC. C’est lui qui reçoit et oriente les usagers lors de notre visite ce mardi 18 avril. Quand un client veut verser de l’argent, il appelle son chef qui lui n’est pas sur place.
Pourtant sur le site internet de la SIC, on peut lire que « l’actionnariat majoritairement public à la SIC est un gage de sa crédibilité. Son expertise, son expérience et son champ d’action en font le N°1 de l’immobilier au Cameroun ». Un numéro un qui donne des dates de livraison, ne respecte pas son cahier de charge et n’informe pas ses clients, c’est à se demander numéro 1 dans quoi ? Sinon monsieur le ministre de l’Habitat et du développement Urbain est ce que les pauvres Camerounais qui ne cherchent qu’à rentrer dans leur droit peuvent savoir pourquoi des immeubles sont finis et sont abandonnés dans la broussaille et aux squatteurs à Mbanga Bokoko ?
5616 logements sociaux au Cameroun
Le Cameroun compte 5616 logements sociaux construits par la Société immobilière du Cameroun. Lesdits logements sont repartis comme suit : 2 504 logements à Yaoundé, disséminés à travers les Sic de la Cité verte, Biyem Assi, Mendong, Messa, Nlongkak, Hyppodrome et Bastos. Douala, la capitale économique vient avec 2 386 logements situés dans les zones de Bonamoussadi, Makepe, Kotto, Bassa et Palmier. A Garoua, on décompte 283 logements dans les quartiers Rumde Adja et Bornouans. Ebolowa dispose de 62 logements à Angale. Maroua compte 102 logements, Bertoua 101 logements, Edéa 83, Buéa 40 et Limbé 55 logements au quartier Mbanda.
Ce billet est ma contribution à la campagne #LogementsSociauxCmr initiée par les blogueurs du Cameroun. Le prochain billet vous sera servi par Thierry Didier Kuicheu sur son blog http://tdkuich.mondoblog.org. Il racontera les logements sociaux pas du tout sociaux du Cameroun.
Armelle Nina Sitchoma
Bonjour tres chere. juste vous dire que je suis dans la meme situation . j ai pu acheter un appartement T5 a Mbanga Bakoko a 20 832 000 fcfa depuis septembre 2014 et ca fera bientot 3ans je ne suis meme encore en possession de mes cles. j ai pris un credit que je rembourse et je suis en location ce n est pas facile.vraiment aidez nous a nous retrouver tous afin qu on saisisse officiellement le ministre et les parties prenantes par voie d hussier afin que nous puissions rentrer dans nos droits. nous sommes fatigues d attendre et de continuer a payer le loyer
Vraiment, c’est fatigant. Ca va faire un an que je suis dans l’attente des clés. Si j’avais su un instant que les choses se présenteront ainsi, je me serai abstenu. Bien, les dés sont jetés, se retrouver tous tous serai l’idéal , il faut secouer un peu. mais comment? quelqu’un a une idée?